lundi 24 juin 2024

Miss Singer

Mon père était quelqu'un de généreux, donc quand au milieu des années 70, ma mère souhaita acheter une machine à coudre, il la lui offrit et l'encouragea à choisir le dernier modèle chez Singer, un engin sophistiqué, avec un meuble dédié en prime ! 
Tout cela était fort cher, et ma mère aurait sans doute préféré une machine plus simple, mais papa, qui savait coudre à la main - et détestait ça ! - voulait qu'elle ait une machine performante, le vendeur assurait que c'était un investissement, et offrait une machine à coudre pour enfant pour moi en cadeau (atteindre les parents en passant par les enfants n'est donc pas si récent comme technique de vente !)

 

la machine pour enfant ressemblait à la vraie machine

Cette petite machine Golden Princess, marchait avec des piles ou avec une manivelle, (et cousait médiocrement dans les deux cas !) ; elle était prévue pour coudre des vêtements en kit pour la poupée du même nom que la machine. 

J'avais donc inscrit poupée et kit sur ma liste de Noël, mais hélas ! l'opération commerciale n'avait pas eu le succès escompté, et s'était terminée des années avant que j'ai ma machine ! 
La boutique Singer de Toulon n'avait même jamais eu la poupée et à peine quelques kits ! 

J'avais quand même découvert que j'aimais coudre, même avec un engin aussi décevant, et ma mère qui n'utilisa jamais les fonctionnalités compliquées de sa Singer, (qui était censée pouvoir broder avec des "cames directrices"), m'apprit à m'en servir. 
C'était une excellente machine qui cousait très bien et avait la fonction "boutonnières automatiques", ce qui était une première ! 

Etant têtue, je me suis obstinée des vacances entières à tenter de maîtriser la fonction "broderies", avec quelques résultats, mais rien d'exceptionnel : certaines cames ne fonctionnaient pas, et les réglages étaient diaboliques ! D'ailleurs les machines suivantes n'ont plus du tout utilisé le même système.

Aussi inutile qu'elle était, j'ai gardé ma mini machine, et par hasard, je suis tombée sur des kits de vêtements sur le Net, qui m'ont sauté aux yeux :leurs emballages ayant le même dessin que sur la boîte de la machine. 
Quelques recherches, et j'ai identifié la poupée ; il y en eu deux en tout, la première en 1967/68, la seconde en 1969. 
Elles représentent des préadolescentes, toutes les deux rousses et fabriquées par Sébino ; elles mesurent 48 cm, et ont des articulations à boules. 

C'est paradoxal, car elles sont à la fois peu connues et très recherchées, ayant été diffusées en moindre quantité ; les poupées sont souvent chères, inabordables en boite. Les kits, seulement au nombre de 6, ne sont pas si recherchés, d'autant qu'ils sont parfois à des prix délirants incompréhensibles ! 
Les chaussures d'origine, un genre de mocassin, sont elles, si introuvables, qu'elles trouvent preneur dès qu'une paire est en vente, quasiment quel que soit le prix ! 

Je crois que cette poupée prend trop au sérieux son nom de Golden Princess ! 

J'ai trouvé, à un prix raisonnable, un lot d'une poupée sans sous-vêtements ni chaussures, mais avec deux kits commencés ; j'attends le colis avec impatience, même si mes deux machines à coudre actuelles sont en réparation ! 

Premier modèle, la robe est bleue ou rouge


Premier modèle en tenue complète avec robe rouge

Deuxième modèle en habits d'origine

Une deuxième tenue d'origine ,

 

J'ai cousu très longtemps avec la machine de ma mère avant qu'elle ne tombe définitivement en panne, il y a seulement quelques années : un problème de pignons (l'argument de vente était vrai : la machine a été bien amortie !). 
Singer proposait une possibilité de réparation la dernière fois que j'ai cherché, mais il fallait compter 130 € rien que pour le remplacement desdits pignons, et pour les toulonnais, convoyer l'engin jusqu'à Aubagne, 100 km aller-retour ; j'ai renoncé...


Toutes les photos et informations viennent des excellents sites Infopoupées.com et Paramourdespoupées.com



samedi 15 juin 2024

Pour Françoise (Moumoudolls)

 Françoise de Moumoudolls a eu la gentillesse de me dire qu'elle trouvais beau le Négri qui illustrait l'article sur les pyjamas ; alors je me suis dit que j'allais mettre en ligne des photos de mon plus beau Négri, le 60. 
Ses oreilles percées indiquent que le malheureux devait être affublé de la panoplie colonialiste de l'époque, avec pagne en raphia et gros anneaux d'oreille ; ce n'est vraiment pas ce que je préfère ! Mais je l'ai eu tout nu, et je lui ai mis une barboteuse d'enfant, un peu grande - il faudrait que je la reprenne - mais quasi neuve. 
Son petit hochet, un cygne, n'a pas de marque apparente, et je suis peu calée en hochets de celluloïd : je sais que le Japon en a beaucoup fait, mais ils marquaient généralement tout ce qu'ils faisaient...
(Photos pas formidables : je maitrise un peu mieux mon portable, mais les poupées noires n'y mettent pas du leur ! Et dès qu'il y a un endroit dégagé bien placé sur la terrasse, au soleil mais pas trop, il y a un chat qui dort dessus ! 



  







vendredi 14 juin 2024

Bonne nuit !

 Histoire du pyjama

En matière de vêtements, j'ai un très gros faible pour les pyjamas ! 
Ok : c'est un vêtement d'intérieur - il n'a pas toujours été que ça - mais qui peut être aussi élégant que confortable. 
Ou pas, aussi : je me souviens d'avoir demandé un pyjama pour Noël, à ma marraine, quand j'avais 12 ou 13 ans. Elle n'avait aucune idée de ce que portaient les enfants la nuit, et m'avait offert un luxueux pyjama azur en maille fluide, incrusté de dentelle crème, avec veste kimono à larges manches, qui était trop chaud pour l'été, pas assez pour l'hiver, et surtout aussi confortable pour dormir qu'une camisole de force ! 

Le pyjama vient d'Asie, d'Inde notamment, vers le milieu du 18ème siècle ; c'est un vêtement pour homme, un pantalon souple à jambes larges dont le nom en hindi "pajama", vient du perse "paejama", qui signifie justement "couvre les jambes". 
Quelques colons britanniques aristocratiques, d'esprit excentrique, l'adoptent pour dormir, et le ramènent au royaume Uni ; la mode se répand peu à peu surtout parmi les classes aisées.

Au début 20e siècle, le pyjama fait son entrée sur le continent américain. La chaîne de grands magasins Sears Roebuck, qui a découvert ce vêtement et son potentiel, cherche alors à promouvoir cette nouvelle pièce dans son catalogue, en la présentant comme « une chose parfaite pour le voyage » permettant « une plus grande liberté que la majorité des chemises de nuit habituelles ». 
Dès lors, le pyjama s’impose comme étant le vêtement de nuit pour homme par excellence, et par effet rebond est adopté par les pays qui admirent la praticité américaine.

Les femmes s'emparent du pyjama grâce à Coco Chanel qui créée le « pyjama de plage » en 1918. Le vêtement, au look totalement androgyne, présente un chemisier boutonné et un pantalon ample. Sa sortie génère une petite onde de choc dans le milieu de mode, mais rapidement, le pyjama fait sensation sur les plages occidentales ; c'est le premier pantalon féminin qui n'est pas un sous-vêtement, et il est toléré dans ce contexte estival, alors que normalement, le pantalon, vêtement masculin, est interdit aux femmes !


Sur la plage à Nice

Planche de poupée à habiller


Le pyjama en tant que tenue de nuit féminine suit le mouvement adopté également pour les enfants garçons et filles.

 

Pour la plage ou une tenue de nuit chic

Pour les bébés, la combinaison dite grenouillère est une libération, et le Babygro en maille éponge, une révolution ! 
Inventé aux Etats Unis par Walter Artzt, qui associe les mots "baby" et "grow" (grandir), pour sa création ultra-souple et confortable. Il s'associera à la société FRA-FOR de Troyes, au début des années 60, avec le succès que l'on connait


Une citation amusante dans un roman contemporain, disait que Babygro était l'abréviation de "Baby grossit tellement vite qu'on ne peut croire que l'on vient de payer une fortune, un vêtement déjà trop petit !"


La série à la mode du Manège Enchanté se déclinait aussi en pyjamas


Autre pyjama féminin célèbre : le Baby Doll, une tunique ample et courte, associée à un panty, le tout très froufrouttant, si possible. Cette tenue insolite vient du film éponyme d'Elia Kazan, en 1956, et en dépit de l'histoire passablement glauque, la tenue de nuit de la jeune héroïne aura un grand succès

Francette en pyjama Baby Doll. Modes et travaux mars 1959


Ma description ne serait pas complète sans mentionner un épisode de ma série britannique préférée Doctor Who, où the Doctor sauve le monde en pyjama (The Christmas invasion, 2005, BBC). 
Il précise d'ailleurs que c'est très Arthur Dent comme attitude ; Arthur Dent étant le héros - en pyjama - d'une autre fabuleuse histoire !

David Tennant, the 10th Doctor

Mes poupées en pyj'


 
 
Comme j'aime tout particulièrement les imprimés enfantins anciens, j'ai surtout recherché des pyjamas dans ce genre de tissu (qui étaient utilisés pour les pyjamas d'enfants, en premier lieu ; les fabricants de vêtements pour poupées suivant la tendance, et le fait-maison utilisant les chutes de tissu). 
Un poupon Desrues de 40 cm présente ce que je pense être un de mes plus anciens pyjama, minutieusement bordé, avec de jolis détails


 Le pyjama est orné d'un galon tressé que ma mère appelait de la liliane, mais je n'ai jamais vu ce terme nulle part...
 
 



Ce Petitcollin modèle de 1924 est un peu engoncé dans son pyjama et sa robe de chambre, mais c'est parce qu'il porte aussi sa robe en dessous ! Vu ma tendance à tout perdre, je préfère pour l'instant laisser son vestiaire sur lui comme je l'ai reçu !


 
Cet Asiati de 45 cm est probablement mon Asiati le plus ancien. Il porte ici un pyjama fait maison plus jeune que lui
 


Il est loin d'être en parfait état, des plaques de peinture sont parties de ses joues, mais j'aime son expression impassible...



Ce Négri de Petitcollin de 45 cm porte un pyjama acheté neuf dans son emballage, aux puces de St Ouen. Il était prévu pour une poupée avec un plus long cou, mais pas d'une marque particulière : des habilleurs comme Colibri ou Josiane Bohuon fabriquaient et vendaient en magasins de jouets, des garde-robes qui convenaient à plusieurs poupées



Cette petite allemande Cellba de 30 cm porte un pyjama acheté, trouvé au salon de l'Isle sur la Sorgue cette année


Mambi de Schildkröt, 32 cm, porte un modèle de pyjama prévu pour Bambino, que j'ai cousu avec un kit de Lydie, jaimeuze52, sur eBay (j'ai rajouté le biais vert car Mambi est plus élancé que Bambino)



Ce petit Anel de 25 cm porte un modèle typé années 20, mais sûrement plus récent : pantalon ample et veste courte et ceinturée



Un baigneur reçu d'Allemagne était vêtu de ce pyjama en maille qui ne semble pas être fait maison, est-ce qu'il appartiendrait au vestiaire de quelqu'un ? Il est prévu pour une poupée de 40/45 cm, et je le daterais des années 70. 
Je ne connais pas de poupées allemandes à trousseau, mais je ne connais que très peu les poupées allemandes qui sont venues après les cellulos (sauf un peu Pétra, maintenant !)



Une petite histoire du pyjama : https://plus.lapresse.ca/screens/52e87d33-0be8-4b64-865e-7c608dabb7ef%7C_0.html
Histoire du Babygro :
https://jewpop.com/ils-sont-partout/la-vie-extraordinaire-isidore-frankforter-rabbin-grenouillere/
Blog sur le pyjama de plage : 
https://lamodepyjama.blogspot.com/?m=1
Le pyjama Baby Doll
https://thevintagewomanmagazine.com/oh-baby-doll/

mercredi 5 juin 2024

Souvenirs de l'Exposition Coloniale

Les éléments de ma collection de cellulos, se traquent bien plus sur les sites de vente que dans les vide-greniers, et je furète tous les jours sur un célèbre site, evilBay comme le nomme Françoise (Moumoudolls) ! 
C'est comme ça que je suis tombée sur une énormité en dépit de sa taille : ce petit SIC de 6,5 cm, vendu 850 € ; huit cent cinquante euros ! Je crois que même un Asiati de grande taille, neuf et en vêtements d'origine ne pourrait pas faire ce prix, peut-être le mythique Mulâtre (qui doit être un prototype) ! J'ai été tentée de contacter la vendeuse pour lui demander s'il s'agissait d'une erreur de virgule, mais si c'était le cas, ça n'améliorerait guère ses chances de le vendre : 85 € serait bien trop cher également. 

 


D'autant que son poupon ne date pas du tout de 1902, comme l'indique la description : c'est un Baby modèle créé en 1920, et les vêtements en papier d'inspiration vaguement asiatique le désignent comme un article peu cher. Les pieds nus peints en noir, indiquent mieux qu'une étiquette, sa nature de poupée folklorique.
Je le ferai dater de 1931, une des innombrables poupées souvenir prévues pour l'Exposition Coloniale - encore elle ! L'habitude de ramener une poupée folklorique des endroits que l'on visitait existait déjà depuis longtemps, et l'avènement des congés payés, en 1936, l'a fortement développée (et pendant très longtemps, l'industrie d'habillement des poupées folkloriques a donné du travail à domicile aux femmes, qui ont eu ainsi, un peu plus d'émancipation)
L'Exposition Coloniale, qui prétendait offrir un tour du monde sur quelques hectares, se devait d'offrir aussi des souvenirs de tous ces pays. La création de l'Asiati et du Négri, était liée à cette vague exotique, et en tant que derniers modèles, ils étaient trop couteux pour des souvenirs ; mais des poupées un peu plus anciennes, et toutes petites, comme le Baby de la SIC figuraient à moindre frais, les habitants de ces lointains pays...

Voici, parmi mes poupons de la même époque, ceux dont je pense qu'ils viennent des boutiques de souvenirs de cette exposition


Le petit groupe est présenté dans un parce en bois léger d'à peu près la même période

 
Deux Baby de la SIC (7 cm) vêtus de rubans

 

Deux Baby de la SIC (7 cm) vêtus de raphia

Un Petitcollin (9 cm) vêtu d'un reste de pagne en papier. Ses anneaux d'oreilles sont un simple fil de laiton, et il devait porter une coiffure

Encore plus typique, ce Petitcollin de 15cm, vêtu d'une tenue en peau de serpent ; on avait l'exotisme subtil à l'époque ! Je suis sûre que lui est un authentique souvenir, car j'avais raté son jumeau aux enchères, jumeau qui contrairement au mien n'avait pas perdu une étiquette collée sur son ventre, affichant fièrement "Souvenir de l'Exposition Coloniale de Paris", chose qui m'a toujours paru improbable, puisque si on achète un souvenir d'un endroit visité, c'est parce qu'on lie soi-même l'objet à l'endroit ; mais ça n'a visiblement pas toujours été ce mode de pensée : d'innombrables objets peuplant les brocantes attestent qu'un souvenir ne pouvait en être un, que s'il portait l'estampille "Souvenir de Plou-les-ajoncs" *



* Petite devinette : qui pourra me dire dans quoi est mentionné la ville - fictive ! - de Plou-les-ajoncs ?

Max Beuster

Extrait du livre Celluloids de Anne Sitz Au début des années 2000, quand j'ai réussi à me procurer ce bouquin de références sur les poup...