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Un seul bras intact et pas de pieds !
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Des yeux peints dits "intaglio" : une belle profondeur de regard
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Il y a des années, au moins 6 ou 7 ans, ce poupon était dans une enchère sur eBay, et j'étais devant l'écran de mon ordi, en regardant le décompte des minutes, puis des secondes, avec mes pensées balançant de "Il est si beau et si peu cher", à "Il est très rare, oui ; mais dans quel état !"
A 8 secondes de la fin, j'ai enchéri, et je l'ai obtenu...
Ce beau garçon est de la société Cellba, une entreprise tout d'abord nommée Schoberl et Becker, qui était une des importantes fabriques de poupées allemandes, avant et après guerre, de 1925 à 1960.
Je n'ai pas identifié formellement son modèle : l'usine ayant été bombardée à plusieurs reprises pendant la deuxième guerre mondiale, beaucoup d'archives ont été détruites.
La marque des poupées Cellba qui est une sorte de sirène ailée et couronnée, est légèrement différente selon la période ; la sienne le situe avant 1935, et surtout, toutes les poupées noires et mulâtres furent interdites à la fabrication et à la vente en 1933 par le régime nazi. Décidément, les poupées n'échappent pas à la politique !
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Le dessin du haut montre le marquage jusqu'en 1935 ; celui du bas ensuite
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Le modèle du poupon debout est celui qui se rapproche le plus du mien, mais sa tête n'est pas mobile, et la mèche sur le front est plus volumineuse
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Dès son arrivée, je me suis mise à chercher des membres de remplacement, et découvert que Cellba avait fait beaucoup plus de poupons aux jambes courbes que de fillettes et garçonnets aux jambes raides : les pièces détachées étant rares en proportion, forcément ; en outre, le cellulo allemand est en général plus épais et solide que le français, et casse de moins bon cœur, ce qui limite encore les membres récupérés...
La taille, 40 cm, n'est pas des plus courantes non plus, et ce qui m'a fait beaucoup de fausses joies sur eBay.de, c'est la mention "années 40" que les vendeurs indiquaient fièrement pour dater leur poupée, le "40" trompant la fonction "rechercher" (je ne suis pas sûre qu'en tant qu'allemand contemporain, j'aurais tellement voulu mettre l'accent sur ces années-là ! Actuellement, il semble que certains en Europe, aiment visiblement si fort cette période que l'histoire a l'air de bégayer ! Mais je veux éviter la politique dans mon blog : ma tension artérielle n'a déjà que trop tendance à faire du trampoline !)
Bilan de quelques années de recherches : une paire de bras Cellba, de la bonne forme et de la bonne couleur qui à l'arrivée, se sont révélées être de taille 34 ; comment un vendeur peut-il se tromper autant ? En récupérant, sans s'y connaitre, des pièces détachées sur les restes d'une poupée marquée 40, rafistolée pendant la guerre justement, avec les moyens du bord !
J'ai élargi la recherche à d'autres marques, et finalement trouvé une paire de bras de marque Maréchal (Nan, je ne ferai pas de blague lourde avec les années 40 !). Il faut les repeindre, et ils sont un peu plus longs et minces que les originaux : les poupées allemandes ont les bras courts ; mais c'est le même diamètre à l'épaule.
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Je ne perds pas espoir, une fois que j'aurai bien galéré à installer les nouveaux bras, fraîchement repeints, de trouver un bras gauche parfait...
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J'ai débuté la rénovation du poupon en transpirant abondamment d'inquiétude : sur ce modèle, la tête est fixée avec un solide ressort à un tube de cellulo épais qui fait un tunnel pour l'élastique (il y a le même pour les bras). Le crochet relié à l'anneau de la tête n'a rien voulu savoir malgré tous nos efforts, il a fallu le couper ; merci à Elise pour son aide et son matériel !
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J'ai utilisé le bras en miettes pour préparer la pâte de celluloïd, mais j'ai eu tort de vouloir redresser le cellulo avec de l'eau très chaude : ça a marché , mais ça l'a blanchi et j'ai dû repeindre
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Evidemment, vu ma tendance au rangement anarchique, je ne retrouve pas mon papier à poncer japonais ultra-méga-fin-pouêt-pouêt-tralala que j'ai depuis si longtemps qu'il est encore étiqueté en francs, et qui fait du travail impeccable ! J'espère en trouver à la boutique de modélisme, sinon il faudra que j'en commande...
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Un demi pied en tout et pour tout...
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J'avais réfléchi à plusieurs manières hasardeuses pour reconstituer les pieds, par exemple en utilisant une chaussette remplie d'ouate ; mais aucune chaussette dans mn stock n'était vraiment à la bonne taille, et ça faisait des pieds trop gros et mous, sans plante de pied. Ayant constaté que travailler de la pâte de cellulo était moins difficile que ce que je croyais, j'ai récupéré les pieds d'un malheureux Jacky SNF qui s'était littéralement auto-détruit - catastrophe qui n'est pas rare avec le celluloïd de certains SNF ! - et je les ai greffés !
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L'angle de la photo peut prêter à des commentaires : je sais, je sais...
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J'ai également réussi à décabosser le mollet qui avait pris un bon coup : j'en ai été épatée ! En vérité, ça a été ridiculement facile avec le prêt par Elise, très équipée, de son décapeur thermique ; j'ai ramolli l'endroit du choc, et j'ai soufflé dans la jambe en me servant d'un vieux bout de paille en plastique qui protège la pointe d'un pinceau fin !
J'ai fini ma réparation, et en empruntant à Colette (pas la poupée !) une expression que j'aime beaucoup : je suis fière comme un pou sur ses pattes de derrière !
Pourtant, il n'y a pas de quoi : l'encolure est un peu plus droite et n'a plus tous ces trous et ces fissures, mais ils sont remplacés par des cicatrices ! Ensuite, le pauvre gars est loin d'avoir les patounes les plus belles du département, ni les bras : ils sont couverts de traces de pinceau, et la couleur n'est pas uniforme (je n'ai pas encore osé
emprunter le très précieux aérographe de Elise), sans oublier que mon vernis satiné, en séchant, s'est révélé trop brillant !
Globalement, il vaut mieux ne pas zoomer !
J'ai remonté toutes les pièces en remplaçant le ressort par du cordon élastique, mais en gardant les crochets. Les bras ne sont pas parfaitement plaqués car le "tunnel" de l'élastique dépasse un peu et les nouveaux bras sont moins creux au niveau de l'attache. Les jambes tombent mal aussi, mais là, c'est d'origine : j'ai l'impression que pour les premiers modèles à jambes droites de chez Cellba, ils ont gardé le même corps que pour les jambes courbes, et la jambes ne s'adapte pas très bien surtout si on veut assoir la poupée.
Pour camoufler tout ça, je lui ai cousu un pyjama en adaptant un kit de Jaimeuze52 pour Françoise de M&T, et des pantoufles de feutrine qui ont été une plaie à faire, défaire, refaire (et qui ne sont même pas réussies)
Le mini doudou qui l'accompagne avait tout d'abord été posé dans mon berceau, et plus tard, je l'ai baptisé Christine-Chien, du nom d'une amie de mon âge que j'aimais beaucoup (c'est toujours le cas) ; le fait que Christine soit un prénom féminin, et mon chien non, ne m'a jamais dérangée (ni lui, apparemment ) !
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En quelques secondes, la feutrine des pantoufles a attiré tous les poils de chat du secteur !
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Christine-Chien est bien un peu mangé aux mites, mais je n'ose pas intervenir...
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